La crise afghane entraîne des pertes d’emplois massives, selon un rapport de l’OIT
BANGKOK — Plus d’un demi-million de personnes en Afghanistan ont perdu leur emploi depuis la prise du pouvoir par les Talibans à la mi-août, indique l’Organisation internationale du travail dans un rapport publié mercredi.
Selon l’OIT, la crise a paralysé l’économie et frappé de plein fouet le marché du travail. La situation est particulièrement dévastatrice pour les femmes et pour les personnes travaillant dans l’agriculture, les postes gouvernementaux, les services sociaux et la construction, de nombreuses personnes ayant perdu leur emploi ou ne recevant pas leur salaire.
De nombreuses entreprises ont du mal à se maintenir à flot, alors que des milliers d’Afghans fuient le pays chaque jour. Selon le rapport de l’OIT, l’agence des Nations Unies qui œuvre à la promotion des normes du travail et du travail décent pour tous, entre 700 000 et 900 000 emplois devraient avoir été perdus d’ici juin, alors que le travail se raréfie.
Les retombées économiques de la prise de contrôle ont été considérables, avec des pénuries de liquidités et des limites sur les retraits bancaires qui ont mis en difficulté les entreprises et les particuliers.
L’économie était déjà chancelante après quatre décennies de guerre, une grave sécheresse et la pandémie. Après la prise du pouvoir par les talibans, dans un contexte de retrait chaotique des troupes américaines et de l’OTAN, la communauté internationale a gelé les avoirs de l’Afghanistan à l’étranger et interrompu tout financement, ne souhaitant pas travailler avec un gouvernement taliban, étant donné sa réputation de brutalité lors de son précédent règne, il y a 20 ans.
« La situation en Afghanistan est critique et un soutien immédiat à la stabilisation et au redressement est nécessaire », a déclaré Ramin Behzad, coordinateur principal de l’OIT pour l’Afghanistan, dans un communiqué.
« Si la priorité est de répondre aux besoins humanitaires immédiats, un redressement durable et inclusif dépendra de l’accès des personnes et des communautés à un emploi décent, à des moyens de subsistance et à des services de base », a-t-il ajouté.
Les femmes occupaient environ un emploi sur cinq en Afghanistan en 2020, mais on les empêche désormais de travailler dans certaines régions. L’éducation des filles a également été limitée, bien que les dirigeants talibans aient déclaré qu’ils espéraient pouvoir ouvrir toutes les écoles pour filles dans le pays après la fin mars.
Le rapport de l’OIT est le dernier appel en date à un soutien international accru pour le peuple afghan, alors que l’ONU prévient que 8,7 millions d’Afghans sont au bord de la famine.
La semaine dernière, le Secrétaire général de l’ONU, Antonio Gutteres, a exhorté la communauté internationale à financer un appel humanitaire de 5 milliards de dollars, à libérer les avoirs gelés de l’Afghanistan et à relancer son système bancaire afin d’éviter un effondrement économique et social.
Le rapport de l’OIT estime que l’emploi des femmes a chuté de 16 pour cent en juillet-septembre, par rapport à ce qu’il aurait été sans la prise de pouvoir des Talibans. La baisse pour les hommes était de 5 pour cent, selon le rapport.
Bien qu’il s’agisse d’une dure épreuve, cela suggère que la plupart des femmes qui travaillaient ont toujours leur emploi, notamment à l’aéroport, aux douanes, dans le secteur de la santé et de l’éducation.
Les droits des femmes se sont nettement améliorés au cours des deux décennies de présence internationale en Afghanistan, mais ils sont considérés comme menacés par le retour des Talibans, qui les avaient pratiquement cloîtrées dans les années 1990.
Le rapport de l’OIT note que la détérioration des conditions d’emploi peut également conduire à un recours accru au travail des enfants dans un pays où plus d’un million d’enfants âgés de 5 à 17 ans travaillent.
De nombreux enfants ne sont pas scolarisés ou travaillent — seuls quatre sur dix étaient scolarisés selon une enquête menée en 2019-2020.
Les agences de l’ONU travaillent avec les entreprises et les syndicats afghans pour tenter de fournir une assistance cruciale et de maintenir les services communautaires, selon le rapport.