Réforme de la caution : Lametti dépose un projet de loi ciblant les récidivistes violents
Le ministre de la Justice, David Lametti, a déposé mardi un nouveau projet de loi visant à sévir contre les récidivistes violents qui se voient accorder une libération sous caution, grâce à une poignée de réformes ciblées du Code criminel.
Ce petit paquet de réformes législatives, qui ne s’étend que sur sept pages, survient après des mois d’examen renouvelé du système de libération sous caution du Canada et demande au gouvernement fédéral de mettre en œuvre des lois plus strictes, face à une série de cas très médiatisés de crimes violents qui auraient été commis par personnes qui étaient en liberté sous caution.
Le projet de loi C-48, tel qu’il est intitulé, vise à renforcer la réponse du système canadien de libération sous caution aux récidives violentes, y compris dans les cas impliquant des armes à feu, des couteaux, des gaz poivrés et d’autres armes. Le gouvernement affirme qu’il essaie également de renforcer la confiance du public dans le système de justice pénale et d’affirmer les principes de la libération sous caution.
Le projet de loi propose cinq modifications précises au Code criminel :
- Créer un nouveau renversement du fardeau de la preuve pour les infractions graves avec violence répétées impliquant des armes lorsque l’accusé a déjà été reconnu coupable d’une infraction répondant aux mêmes critères au cours des cinq dernières années, les deux étant passibles d’une peine d’emprisonnement de 10 ans ou plus.
- Ajouter certaines infractions relatives aux armes à feu aux dispositions qui déclenchent un renversement du fardeau de la preuve afin d’inclure d’autres actes criminels comme la possession illégale d’une arme à feu prohibée ou à autorisation restreinte chargée et l’introduction par effraction ou le vol qualifié pour voler une arme à feu;
- Étendre le renversement actuel du fardeau de la preuve en matière de violence entre partenaires intimes (VPI) pour faire face au risque accru de s’appliquer également aux personnes accusées précédemment libérées d’une infraction impliquant la VPI ;
- Clarifier le sens d’« ordonnance d’interdiction » dans un renversement du fardeau de la preuve existant pour indiquer qu’une ordonnance comprend une ordonnance de mise en liberté sous caution d’un tribunal qui imposait des conditions concernant la possession d’armes à feu ; et
- Exiger des tribunaux qu’ils tiennent compte des antécédents d’un accusé en matière de condamnations pour violence et autres problèmes de sécurité communautaire lorsqu’ils prennent des décisions sur la mise en liberté sous caution.
Les libéraux fédéraux ont également inclus un préambule dans le projet de loi destiné à décrire «les principes fondamentaux du cautionnement et à aider à assurer une mise en œuvre cohérente».
De plus, le gouvernement propose un examen parlementaire pour évaluer les répercussions de cet ensemble de réformes de la caution, cinq ans après l’entrée en vigueur du projet de loi C-48.
En vertu de la Charte canadienne des droits et libertés, une personne accusée d’une infraction a le droit de ne pas se voir refuser une caution raisonnable sans motif valable. Cela leur permet d’être libérés en attendant leur procès, selon le principe de la présomption d’innocence jusqu’à ce qu’ils soient reconnus coupables, et à la condition qu’ils comparaissent devant le tribunal lorsque cela est requis. D’autres conditions telles que les ordonnances de non-contact, les moniteurs de cheville GPS et les couvre-feux peuvent également être imposées.
C’est pourquoi la charge de la preuve, ou le fardeau, incombe généralement à l’accusation de montrer pourquoi un accusé devrait se voir refuser la mise en liberté sous caution. Il y a renversement de la charge de la preuve lorsque la charge de la preuve est transférée à l’accusé et que l’on présume que l’accusé resterait en détention en attendant son procès à moins qu’il ne puisse démontrer au tribunal pourquoi il devrait être libéré.
Le gouvernement fédéral a déclaré que ce projet de loi avait été élaboré « en étroite collaboration avec toutes les provinces et tous les territoires », soulignant la responsabilité partagée en matière d’administration de la justice, de tenue d’enquêtes sur le cautionnement et d’application des conditions de mise en liberté sous caution.
« Les réformes proposées dans le projet de loi C-48 ne sont qu’une partie d’une solution plus large pour garantir que les objectifs du système de libération sous caution sont atteints », a déclaré le gouvernement fédéral dans une note d’information fournie aux journalistes.
Lametti parlera du projet de loi C-48 aux côtés du ministre de la Sécurité publique Marco Mendicino, du ministre des Affaires intergouvernementales Dominic LeBlanc, de la ministre de la Santé mentale et des Dépendances et ministre associée de la Santé Carolyn Bennett, à 13 h 15 HE.
QU’EST-CE QUI A MENÉ À CETTE FACTURE DE SÉCURITÉ ?
Les appels à des réformes se sont intensifiés à l’automne, à la suite de l’annonce que l’un des suspects d’une série meurtrière de coups de couteau en septembre 2022 en Saskatchewan était recherché depuis des mois pour avoir prétendument enfreint les conditions de libération.
En octobre, l’ancien procureur général de la Colombie-Britannique, Murray Rankin, a souligné les réformes du projet de loi C-75 – un projet de loi fédéral adopté en 2019 qui visait en partie à « moderniser et rationaliser » les procédures de mise en liberté sous caution – affirmant que les modifications législatives libérales poussaient par inadvertance davantage de récidivistes à finir à la rue.
Cette législation, proposée par son prédécesseur Jody Wilson-Raybould, visait en partie à réaligner le Code criminel sur les décisions de la Cour suprême. Cela impliquait de voir un « principe de contrainte » codifié dans la loi, après qu’une décision de 2017 ait souligné que les détenus devaient être libérés « dans les meilleurs délais et pour les motifs les moins onéreux ».
Puis, le 27 décembre, après la mort par balle du gendarme de la Police provinciale de l’Ontario (OPP). Grzegorz Pierzchala, il a été révélé que le suspect de 25 ans était recherché par la police pour avoir manqué une date d’audience en août alors qu’il était en liberté sous caution pour des accusations d’agression contre un policier et de possession illégale d’une arme de poing.
Les critiques ont fait valoir que ces cas étaient la preuve que le système de libération sous caution du Canada devait être réformé, pour éloigner les récidivistes violents des rues canadiennes, tandis que d’autres ont cherché à affirmer que la question était beaucoup plus complexe et impliquait la nécessité de mieux faire respecter les violations des conditions de libération sous caution.
Cela a conduit Lametti à répondre aux appels des conservateurs fédéraux, ainsi que des politiciens provinciaux et des dirigeants de la police pour agir et remplacer ce qu’ils considéraient comme des politiques de libération sous caution par un système d’inversion du fardeau de la preuve.
Après s’être engagé à apporter des modifications ciblées au Code criminel pour répondre à ces préoccupations, tout en accusant les législateurs conservateurs d’« utiliser des tragédies pour tenter de marquer des points politiques » sur une question compliquée, Lametti a rencontré ses homologues provinciaux en mars et est reparti
Avec des fichiers de Spencer Van Dyk et Daniel Otis de actualitescanada
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