Le chef de l’armée ordonne l’arrêt des activités non essentielles et se concentre sur la crise du personnel
Le chef d’état-major de la Défense, le général Wayne Eyre, a ordonné l’arrêt immédiat de toutes les activités non essentielles en faveur de l’augmentation du recrutement et de la rétention des militaires, alors que les Forces armées canadiennes font face à une crise de personnel sans précédent.
Eyre a donné l’ordre radical aux commandants supérieurs à travers le pays jeudi, affirmant qu’une action dramatique est nécessaire pour s’assurer que l’armée dispose des troupes nécessaires pour répondre aux demandes et aux menaces croissantes au pays et à l’étranger.
« Je crains qu’à mesure que les menaces à la sécurité mondiale augmentent, à mesure que les menaces intérieures augmentent, notre état de préparation diminue », a déclaré Eyre à une commission parlementaire après avoir rendu son ordonnance.
« Je suis très, très inquiet au sujet de nos chiffres. Et c’est pourquoi nous mettons en priorité l’effort — l’effort prioritaire — la reconstitution de notre armée. »
L’ordre de reconstitution donne une toute nouvelle direction à l’armée après des années de déploiements et d’opérations à cadence élevée au Canada et à l’étranger en faisant du recrutement et de la rétention du personnel sa priorité absolue.
Attendue depuis plusieurs mois, la commande fait suite à une période d’activité sans précédent des militaires. Cela comprend des déploiements à grande échelle en Irak, au Mali, en Ukraine et en Lettonie, ainsi qu’une aide à la pandémie de COVID-19 et aux catastrophes naturelles au Canada.
Cela coïncide également avec des taux de recrutement à la traîne et une pénurie de personnel expérimenté pour former de nouvelles recrues et diriger des missions réelles, ce qui, selon Eyre dans son ordre, « met en péril notre capacité à recruter, former, employer et retenir divers talents canadiens, compromettant ainsi l’état de préparation et la longue santé à long terme des capacités de défense du Canada.
Les forces armées sont censées ajouter environ 5 000 soldats aux forces régulières et de réserve pour répondre à une liste croissante de demandes, mais il manque plutôt plus de 10 000 membres formés, ce qui signifie qu’environ un poste sur 10 est actuellement vacant.
Le problème est devenu si aigu que certaines offres de haut rang ont commencé à utiliser le mot «crise» dans des entrevues avec La Presse canadienne, notamment le commandant de la marine et l’officier responsable du recrutement et de la formation militaires.
L’ordre d’Eyre reflète la gravité de la situation, déclarant: « En raison des niveaux de personnel et de dotation qui ont été aggravés par le fort engagement des FAC dans les opérations, les effets négatifs de la pandémie de COVID-19 et une crise culturelle, la Défense nationale continue de perdre sa capacité à fournir et à maintenir des opérations simultanées à la portée et à l’échelle nécessaires. »
Il a également souligné le besoin d’urgence, déclarant: « Le processus de reconstruction doit se dérouler selon un calendrier accéléré compte tenu de l’environnement géopolitique dans lequel nous nous trouvons, en particulier à la lumière de l’invasion de l’Ukraine. »
À cette fin, l’ordre ordonne aux commandants de donner la priorité aux centres de recrutement et aux écoles de formation entièrement dotés en personnel et appelle à une réévaluation complète de la structure et de la composition actuelles de l’armée.
Les commandants militaires examineront de plus près quelles missions et autres activités ne sont plus critiques, si certains postes dans leurs unités ne sont plus nécessaires, et même si certains objectifs de recrutement sont toujours réalistes.
Eyre ouvre également la porte à des modalités de travail plus flexibles pour les militaires tout en soulignant la nécessité continue de changer la culture de l’armée pour mieux attirer et retenir les femmes, les peuples autochtones et d’autres groupes sous-représentés.
« Le changement de culture restera la priorité absolue du département tout au long du processus de reconstitution », indique l’ordonnance. « Cette entreprise nécessitera des ressources importantes et une volonté d’adopter les recommandations des autorités d’examen externes. »
La nouvelle approche ne sera pas sans risques, ce qu’Eyre a reconnu en dirigeant une réduction des exercices d’entraînement à grande échelle en faveur de classes plus individualisées alors que l’armée se concentre sur l’obtention de suffisamment de troupes dotées de compétences de base dans les rangs.
Alors que les commandants militaires ont précédemment souligné l’importance des exercices à grande échelle, l’ordre indique qu’Eyre « sera prêt à accepter la réduction associée des niveaux de préparation en utilisant une approche basée sur les risques ».
Et tandis que de nombreux membres des Forces armées se joignent à des missions, le chef de la défense a ordonné aux commandants de « trouver un équilibre entre l’offre d’opportunités de déploiement aux membres juniors et la nécessité de reconstruire notre capacité de leader de niveau intermédiaire ».
Le chef de la défense a indiqué que l’effort de reconstitution prendra jusqu’à huit ans, avec l’objectif immédiat de développer la force et de travailler vers l’objectif plus large de s’assurer que la taille et la structure de l’armée sont alignées sur les besoins et les missions futures.
« Des événements externes tels que des urgences nationales majeures causées par le changement climatique, des crises économiques affectant la flexibilité budgétaire du gouvernement fédéral et des campagnes de désinformation généralisées créant un manque de confiance du public dans les institutions nationales pourraient entraver les efforts de reconstitution », a-t-il ajouté.
Ce rapport de La Presse canadienne a été publié pour la première fois le 6 octobre 2022.