La juge américaine Aquilina exhorte Sport Canada à tenir compte de l’appel à l’enquête des gymnastes
Les gymnastes canadiens restent fermes dans leurs appels à une enquête indépendante sur la culture toxique et les mauvais traitements infligés aux athlètes, et sont en colère de ne pas avoir obtenu de siège à la récente table ronde du ministre canadien des sports.
Un groupe de 71 gymnastes qui a écrit à Sport Canada il y a une semaine compte maintenant plus de 300 signataires et a obtenu le soutien de la juge américaine Rosemarie Aquilina, qui a présidé l’affaire d’abus sexuels de Larry Nassar.
Et dans un communiqué lundi, ils se sont demandé pourquoi la ministre Pascale St-Onge avait exclu «les athlètes mêmes qui ont signalé d’innombrables cas d’abus dans leur sport».
St-Onge a tenu une table ronde d’urgence jeudi, qualifiant la maltraitance dans le sport de « crise ». Au cours de ses cinq mois de travail, St-Onge a déclaré qu’il y avait eu des allégations de mauvais traitements, d’abus sexuels ou de détournement de fonds contre au moins huit organisations sportives nationales.
Dans le communiqué de lundi, les gymnastes ont déclaré qu’ils n’avaient encore reçu aucune communication directe du ministre des Sports.
« Malheureusement, les athlètes mêmes qui ont présenté cette crise n’étaient pas engagés, n’ont pas reçu le procès-verbal officiel de la réunion, et le ministre des Sports n’a pas non plus contacté les dirigeants des athlètes appelant au changement », ont-ils écrit.
Le plaidoyer des gymnastes pour une enquête par un tiers a été entendu à l’extérieur du Canada.
La juge Aquilina, qui a envoyé Nassar, un médecin américain en gymnastique, en prison à vie après des accusations d’agressions sexuelles de la part de centaines de femmes, a enregistré lundi une vidéo de soutien aux Canadiens.
« Je t’entends, je te vois, je te soutiens, j’écoute, je suis avec toi », a déclaré Aquilina dans la vidéo de trois minutes.
« Vous comptez, votre voix compte … vous ne parlez pas seulement pour vous-même, vous parlez pour tous ceux qui ne peuvent pas se manifester », a-t-elle déclaré.
Elle a exhorté Sport Canada et St-Onge à « céder à l’appel des athlètes » et à lancer une enquête tierce où tous les documents sont remis et où les athlètes ont leur mot à dire et sont impliqués dans le processus.
La lettre ouverte des gymnastes est arrivée un mois après que des dizaines d’athlètes canadiens de bobsleigh et de skeleton ont demandé la démission du PDG par intérim et directeur de la haute performance de leur organisation sportive nationale.
« Il ne faut pas s’attendre à ce que les gymnastes restent les bras croisés en silence », indique la lettre de lundi. «Nos collègues gymnastes des États-Unis d’Amérique ont vu / expérimenté leur leadership suivre le même chemin; des réunions ont été convoquées, des guerres de gros titres ont été menées et les cris des athlètes ont été rejetés. Les dirigeants sportifs américains et le gouvernement ont refusé d’agir. Sans la force des gymnastes américaines et leurs appels incessants à des enquêtes et à des réformes, leurs abus n’auraient jamais été révélés.
St-Onge a déclaré la semaine dernière qu’elle accélérait la mise en œuvre d’un mécanisme de signalement des sports sécuritaires, qui fonctionnera par l’intermédiaire du Centre de règlement des différends sportifs du Canada, et qu’il sera obligatoire pour toutes les organisations sportives nationales.
Elle a promis qu’il sera opérationnel à la fin du printemps.
« La tolérance zéro consiste à être courageux pour dénoncer les abus. Tout cela », ont écrit les gymnastes dans le communiqué de lundi. «La tolérance zéro consiste à permettre aux athlètes de partager leurs expériences vécues pour apporter guérison et fermeture et il s’agit de traduire les agresseurs en justice. Il est horrible que les abuseurs et les facilitateurs restent actifs dans la gymnastique canadienne. Sport Canada et le gouvernement canadien ont le devoir inhérent de protéger les droits, les libertés et la sécurité des enfants, des jeunes et des athlètes d’élite.
La lettre originale des gymnastes indiquait qu’il y avait eu de multiples plaintes et même des arrestations pour diverses formes d’abus émotionnel, physique et sexuel.
L’ancien entraîneur féminin canadien Dave Brubaker a été banni à vie par Gymnastique Canada en 2021 à la suite d’une enquête interne. Brubaker a été déclaré non coupable d’agression sexuelle et d’exploitation sexuelle en 2019 après avoir été accusé d’avoir agressé sexuellement une jeune gymnaste il y a des années.
Brubaker a nié l’allégation.
Sa suspension reste en place.
Parmi les autres entraîneurs, mentionnons Marcel Rene qui a reçu une suspension à vie de Gymnastics Ontario en 2021 et Rima Nikishin qui purge actuellement une suspension par la Fédération de gymnastique de l’Alberta en attendant l’enquête sur les plaintes. Les raisons précises de ces deux suspensions n’ont jamais été expliquées par l’une ou l’autre des associations de gymnastique.
L’ancien entraîneur Michel Arsenault, qui faisait face à de multiples chefs d’accusation d’agression sexuelle et d’agression en lien avec cinq anciens gymnastes à Montréal, a obtenu un sursis d’instance en 2021 après avoir été suspendu par Gymnastique Canada en 2017.
Arsenault a nié les accusations.
Ce rapport de La Presse canadienne a été publié pour la première fois le 4 avril 2022.