Explication du projet de loi C-18 : aperçu de la loi canadienne sur les nouvelles en ligne
Le projet de loi C-18 du Canada est devenu loi, exigeant que des accords de compensation soient conclus entre les entreprises technologiques et les organes de presse s’ils souhaitent héberger des liens vers du contenu d’actualités canadien – un cadre que Google et Meta ont rejeté, déclarant tous deux qu’ils bloqueront plutôt le contenu d’actualités canadien.
Mais qu’est-ce que ce projet de loi et les réponses des géants de la technologie signifient réellement pour les Canadiens?
Qu’est-ce que le projet de loi C-18?
Le projet de loi C-18, ou la Loi sur les nouvelles en ligne, établit un cadre qui obligerait les géants du numérique comme Google et Meta à conclure des ententes avec des sites de nouvelles canadiens pour la prévisualisation et le partage de leur contenu de nouvelles en ligne.
« Le projet de loi introduit un nouveau cadre de négociation destiné à aider les entreprises de presse à obtenir une rémunération équitable lorsque leur contenu de nouvelles est mis à disposition par des intermédiaires de nouvelles numériques dominants et génère un gain économique », indique une note explicative du gouvernement. « Il vise à soutenir des négociations équilibrées entre les entreprises qui exploitent des intermédiaires de nouvelles numériques dominants et les entreprises responsables des organes de presse qui produisent ce contenu d’information. »
Le projet de loi obligerait les entreprises technologiques à indemniser les organes de presse canadiens lorsque leur contenu apparaît sur leurs plateformes. Le gouvernement fédéral affirme que le projet de loi vise à aider l’industrie canadienne de l’information, qui a vu ses abonnements et ses revenus publicitaires chuter au fil du temps, ces bénéfices étant transférés à Google et Facebook.
Selon un rapport d’Angus Reid , 85 % des Canadiens ne paient aucun abonnement aux nouvelles en ligne, et les Canadiens de moins de 64 ans consultent généralement les sites de médias sociaux comme Facebook et Reddit en premier pour s’informer.
Selon le directeur parlementaire du budget, qui fournit des analyses économiques et financières au gouvernement en tant qu’organisme indépendant, le projet de loi transférerait environ 329 millions de dollars à l’industrie canadienne de l’information.
Quand le projet de loi C-18 est-il entré en vigueur?
Le projet de loi est devenu loi en juin 2022 et devrait entrer en vigueur dans les six prochains mois.
Comment les géants de la tech ont-ils réagi ?
Google et Meta – la société derrière Facebook et Instagram – ont déclaré qu’ils supprimeraient les liens vers les nouvelles canadiennes de leur plateforme en réponse à la loi, avant la fin de l’année.
Google a qualifié le projet de loi de « taxe sur les liens », affirmant qu’il « casse le fonctionnement du Web et des moteurs de recherche depuis plus de 30 ans ».
Où les nouvelles seront-elles bloquées ?
Les liens vers les plateformes de nouvelles canadiennes ne seront pas partagés sur Google, Facebook ou Instagram lorsque le projet de loi C-18 entrera en vigueur.
Selon une déclaration de Google du 29 juin, les liens vers les actualités canadiennes seront supprimés de leurs produits Search, News et Discover.
La société a noté que cela ne s’appliquerait pas à ses alertes SOS, qui connectent les utilisateurs de Google aux informations de sécurité les plus pertinentes en cas de crise telle qu’un incendie de forêt, une inondation ou un tremblement de terre.
Meta a déclaré dans une mise à jour publiée le 22 juin que la disponibilité des nouvelles se terminerait sur leurs sites pour tous les utilisateurs au Canada « avant l’entrée en vigueur de la loi sur les nouvelles en ligne (projet de loi C-18) ». Ils « effectuent actuellement des tests de produits pour nous aider à créer une solution de produit efficace pour mettre fin à la disponibilité des informations à la suite de C-18 ».
Les tests ne touchent actuellement qu’un « petit pourcentage d’utilisateurs au Canada ».
Google limite également l’accès aux actualités pour le moment à un petit nombre d’utilisateurs canadiens afin de tester plus largement comment bloquer les liens d’actualités.
« Nous testons brièvement les réponses potentielles des produits au projet de loi C-18 qui ont un impact sur un très petit pourcentage d’utilisateurs canadiens », a déclaré un porte-parole de Google à actualitescanada.com en février.
Quels organes de presse sont impactés ?
S’il est de bon sens que les publications qui font de la diffusion d’informations leur principal objectif seront affectées par le blocage de leur contenu par Google et Meta, les limites de ce qui compte comme un site d’actualités aux yeux de cette nouvelle loi ne sont pas encore tout à fait claires.
Google note qu’ils n’hébergeront pas de liens vers du contenu qui a été défini comme une « entreprise d’actualités éligible » par le projet de loi C-18.
La législation stipule que les entreprises de presse sont considérées comme éligibles tant qu’elles répondent à certaines exigences, notamment la production de contenu d’actualité « d’intérêt public », l’emploi de deux journalistes ou plus au Canada, l’exploitation au Canada et le respect du code de déontologie d’une association de journalistes reconnue ou de son propre code de déontologie qui s’aligne sur l’intégrité journalistique.
Selon le projet de loi C-18, une entreprise d’actualités éligible doit également produire du contenu d’actualités « qui n’est pas principalement axé sur un sujet particulier, tel que les actualités, les sports, les loisirs, les arts, le style de vie ou le divertissement spécifiques à l’industrie », suggérant que les magazines de style de vie et les publications similaires peuvent ne pas être affectés par les blocages Google et Meta.
Cela signifie-t-il que les Canadiens n’auront plus du tout accès aux sites Web d’information ?
Beaucoup de gens se dirigent directement vers Google lorsqu’ils veulent savoir ce qui se passe dans le monde, mais une recherche Google n’est pas le moyen le plus direct de trouver vos actualités.
Les Canadiens pourront toujours accéder aux sources d’information canadiennes en naviguant directement sur leurs sites Web.
Google lui-même recommande aux Canadiens de « visiter directement les sites Web de leurs organes de presse préférés – ou de télécharger leur application – et de s’inscrire à des newsletters ou à des abonnements afin qu’ils puissent se tenir au courant des dernières nouvelles directement à partir des sources qui comptent le plus pour eux ».
La mise en signet de vos sites Web d’actualités les plus fréquemment visités vous permettra désormais d’y accéder rapidement, même si leurs liens ne sont pas partagés lorsque vous recherchez un sujet sur Google.
Les Canadiens pourront également toujours voir les nouvelles provenant de sources d’information internationales via Google.
Comment savoir si mes news sont bloquées ?
Environ 4 % des utilisateurs de Google sont actuellement concernés par leurs tests. Afin de savoir si des liens d’actualités sont bloqués pour vous, allez simplement dans le moteur de recherche Google et tapez les termes de recherche liés au Canada, tels que « Ottawa » ou « Trudeau », puis cliquez sur l’onglet « Actualités » de Google. Si la plupart des sources d’information des États-Unis apparaissent, vous faites probablement partie des utilisateurs qui ne voient pas les liens vers les organes d’information canadiens.
Dans un article du 1er juin, Meta a déclaré que les utilisateurs concernés par leurs tests pour bloquer les sources d’information canadiennes recevront des notifications.
« Tout au long de la période de test, qui durera plusieurs semaines, un petit pourcentage de personnes au Canada qui sont inscrites aux tests seront averties si elles tentent de partager du contenu d’actualités », a déclaré la société.
Que disent les partisans et les détracteurs du projet de loi C-18?
Les partisans du projet de loi des gouvernements libéraux affirment que c’est un moyen de contrôler les géants de la technologie et de réduire leur domination numérique, et que les journalistes devraient être rémunérés pour que leur travail soit utilisé pour aider les géants de la technologie à attirer plus de regards et donc plus de revenus publicitaires.
Le ministre du Patrimoine canadien, Pablo Rodriguez, a déclaré à l’émission Power Play de CTV fin juin que
« Environ 500 salles de rédaction ont fermé leurs portes à travers le pays … et elles continueront de fermer leurs portes », a déclaré Rodriguez. « Le statu quo ne fonctionne pas parce que l’argent va aux géants de la technologie. »
L’année dernière. Meta a réalisé plus de 23 milliards de dollars de bénéfices tandis qu’Alphabet, la société mère de Google, a réalisé près de 60 milliards de dollars.
Le rapport a également révélé que 82 % des Canadiens conviennent que « trop peu d’entreprises technologiques ont trop de pouvoir sur Internet ».
Cependant, 63 % craignent de perdre l’accès aux nouvelles canadiennes sur Facebook et Google.
Certains critiques craignent que Google et Meta bloquent les liens d’information provenant de sources d’information canadiennes n’entraînent une baisse de l’éducation aux médias.
L’expert en technologie et en cybersécurité, Ritesh Kotak, a déclaré à actualitescanada Channel que la suppression des nouvelles des plateformes de Google et de Meta pourrait amener les utilisateurs à s’appuyer sur des histoires non vérifiées, rendant « déchiffrer les faits de la fiction » d’autant plus difficile.
« C’est un problème sérieux pour les agences de presse et aussi pour les membres du public », a-t-il déclaré, ajoutant que les médias devraient faire davantage pour promouvoir leurs propres plateformes.