Critique du VIFF : Le respect de la cinéaste pour la militante mohawk porte ses fruits dans « Mary Two-Axe Earley : I Am Indian Again ».
La cinéaste mohawk Courtney Montour a grandi à Kahnawake à deux rues de la légendaire militante autochtone des droits des femmes Mary Two-Axe Earley.
Malgré cela, Montour n’a jamais rencontré Two-Axe Earley, qui est décédée en 1996.
Mais Montour a gardé toute sa vie une fascination pour cette militante courageuse et terre-à-terre qui a laissé une empreinte durable dans le pays.
« Je voulais mieux vous connaître et j’ai commencé à rassembler tous les fragments de votre passé que j’ai pu trouver », dit Montour dans son court-métrage de 34 minutes profondément personnel, « Mary Two-Axe Early : I Am Indian Again ».
Pendant plus de deux décennies, Two-Axe Earley a plaidé en faveur d’une modification de la Loi sur les Indiens afin d’éliminer un article manifestement discriminatoire. Cette mesure assimilationniste retirait aux femmes autochtones leur statut d’Indiennes si elles épousaient un non-Autochtone, ainsi que le statut de leurs enfants.
Cette mesure a eu pour effet de réduire le nombre de membres des Premières Nations officiellement reconnus, diminuant ainsi leur poids politique et facilitant l’accès aux ressources naturelles pour les entreprises.
Cela a également eu un impact profond sur sa vie, car elle a perdu des amis en décidant de poursuivre la lutte pour retrouver son identité.
« Mary Two-Axe Early : I Am Indian Again » a été produit par l’Office national du film et est projeté au Festival international du film de Vancouver.
Le film présente des documents audio et vidéo qui n’ont pas été vus ou entendus depuis des décennies, et offre un portrait complet de la militante mohawk et du degré de discrimination qui existait entre les années 1960 et le milieu des années 1980.
En cours de route, Two-Axe Early s’est heurté à une opposition intense de la part des chefs et des conseils élus, à des menaces de mort de la part des habitants de la réserve et à la condescendance de l’ancien premier ministre Pierre Trudeau.
« J’aimerais que vous et vos sœurs vous sortiez de la tête que d’une certaine manière nous essayons délibérément de frustrer le concept d’égalité », dit Trudeau avec dédain dans le film. « Au moins dans la loi, tout le monde vous a assuré ici que ce n’est pas le cas. Vous savez, dans un sens, vous êtes égaux quand vous pensez que vous êtes égaux. Si vous pensez que vous êtes inégaux, la loi ne changera pas beaucoup. »
Dans un geste intelligent, Montour répète les deux dernières lignes dans ce clip, renforçant la teneur discriminatoire de l’époque.
La législation n’a été modifiée qu’en 1985, après l’arrivée au pouvoir du gouvernement Mulroney.
L’utilisation d’images fixes et de vidéos de vieilles bandes magnétiques a permis de fournir une toile de fond visuelle aux paroles émouvantes de Two-Axe Early, qui imprègnent le film.
Le film est également très personnel, grâce à une conversation autour d’une table de cuisine avec son fils Ed, son amie et collègue activiste Nellie Carlson, et une mère et sa fille qui ont bénéficié de son combat pour la justice, Jody Calahoo-Stonehouse et Isabella Calahoo-Zeller.
C’est une histoire importante car la bataille pour l’égalité des femmes des Premières Nations a continué après sa mort, grâce à Sharon McIvor, résidente de la Colombie-Britannique, et à d’autres activistes.
Comme l’a souligné l’universitaire mi’kmaq Pam Palmater, la pleine égalité des sexes n’a pas encore été atteinte, car les tribunaux sont toujours saisis d’affaires.
« L’Enquête nationale sur les femmes et les filles autochtones disparues et assassinées a constaté que la discrimination sexuelle dans l’inscription au registre des Indiens était une cause profonde de la violence à l’égard des femmes des Premières Nations », a écrit Palmater sur le site de l’Office national du film. « C’est pourquoi l’histoire de la vie de Mary et le mouvement pour l’égalité qu’elle a inspiré sont toujours d’actualité. »
En effet.
« Mary Two-Axe Early : I Am Indian Again » n’est pas seulement un chapitre important de l’histoire du 20e siècle, mais aussi une leçon inspirante pour les militants contemporains sur la valeur de la persévérance.