Des éducateurs demandent une enquête fédérale sur les « abus généralisés » dans le sport canadien
Des dizaines de spécialistes du sport canadiens et internationaux se sont joints au chœur pour demander une enquête indépendante sur le sport au Canada, affirmant que les athlètes canadiens méritent mieux. [Dans une lettre adressée lundi au Premier ministre Justin Trudeau, les spécialistes de la lutte contre les abus dans le sport canadien ont demandé d’urgence la tenue d’une enquête sur la base de « nombreux rapports d’abus sexuels, physiques et psychologiques d’athlètes dans le système sportif national ».
La lettre a été signée par 91 personnes provenant de 30 institutions canadiennes et de 17 institutions internationales.
« (Nous) sommes solidaires des plus de 1 000 athlètes canadiens qui cherchent à obtenir des comptes immédiats et des changements significatifs de la part de Sport Canada et du système plus large qu’il gouverne », dit-elle.
La lettre intervient dans un contexte de demandes croissantes d’enquête après que des athlètes de bobsleigh, de skeleton et de gymnastique, ainsi que plusieurs membres du Parlement, aient plaidé auprès de la ministre canadienne des Sports, Pascale St-Onge, pour une enquête similaire à l’enquête Dubin sur le dopage en 1989.
La lettre des éducateurs a été lancée par MacIntosh Ross, professeur de kinésiologie à l’Université de Western Ontario, qui a écrit plusieurs articles sur les récents scandales de Hockey Canada et sur la crise nationale du sport sécuritaire en général.
« La grande majorité des professeurs ΓǪ ; pensaient qu’il devrait y avoir une enquête indépendante, semblable à l’enquête Dubin », a déclaré Ross en entrevue à la Presse canadienne. « Certainement, les enjeux sont tellement plus élevés pour cette question. Il ne s’agit pas de dopage ou d’une question de concurrence déloyale. Il s’agit en fait de la sécurité et du bien-être des athlètes de tous âges. Il semble donc évident que l’on veuille enquêter et disposer de toutes les informations possibles pour essayer de réparer le système afin que personne d’autre, ou le moins de personnes possible, ne soit blessé à l’avenir. »
Selon les experts, le nombre de plaintes pour mauvais traitements a explosé au Canada en 2022, les athlètes de plus d’une demi-douzaine de sports menant une guerre contre les dirigeants, lançant des allégations de toxicité et d’abus, et plaidant pour un changement généralisé.
Les témoignages ont également commencé le mois dernier devant les membres du Parlement pour les audiences du Comité permanent de la condition féminine sur la sécurité des femmes et des filles dans le sport.
« La réponse du gouvernement à la maltraitance des athlètes reste terriblement inadéquate et ne s’attaque pas aux facteurs sous-jacents responsables de la maltraitance généralisée des athlètes dans le système sportif », indique la lettre de lundi. [Bien que M. St-Onge ait créé le premier Bureau du commissaire à l’intégrité du sport (BCIS) au Canada en juin, en tant que guichet unique et enquêteur indépendant sur les plaintes, la lettre soutient que ce n’est « pas une solution ».
« Sans une indépendance complète par rapport aux autorités sportives canadiennes, le CISP n’aura jamais les pouvoirs nécessaires pour résoudre cette crise. L’OSIC est une réponse inadéquate à la culture toxique des abus. Il n’a pas l’indépendance, la capacité, les pouvoirs, l’expertise et le mandat nécessaires pour mener une enquête de l’ampleur et de la profondeur requises. »
« En bref, le gouvernement permet à Sport Canada d’enquêter sur lui-même. »
Ross, qui a un doctorat en kinésiologie et qui donne des cours sur les questions olympiques et l’histoire du sport, entre autres, a dit qu’il était consterné après qu’un petit nombre de spécialistes du sport canadien aient récemment déclaré qu’aucune enquête indépendante n’était nécessaire. Cela l’a incité à prendre contact avec d’autres personnes, et le mouvement a fait boule de neige à partir de là.
« Les athlètes canadiens méritent mieux. Ils méritent mieux », peut-on lire dans leur lettre. « Leur sécurité et leur bien-être devraient être la priorité absolue. Pour réformer le système sportif et prévenir les abus à l’avenir, nous devons connaître l’ampleur du problème. Sans cette information, le statu quo toxique persistera.
« Nous exhortons le gouvernement canadien à lancer une enquête judiciaire indépendante sur les abus commis par les athlètes au Canada, à l’instar de l’enquête Dubin de 1989. La sécurité des enfants, des jeunes et des athlètes d’élite du pays en dépend. »
Ce reportage de La Presse Canadienne a été publié pour la première fois le 23 janvier 2023