Les scénarios de la BoC montrent que le secteur financier est exposé aux chocs potentiels de la transition climatique
OTTAWA — Le secteur financier du Canada pourrait être exposé à des chocs économiques importants lors de la transition vers des émissions plus faibles, selon les premiers scénarios modélisés par la Banque du Canada et l’organisme de réglementation bancaire.
L’étude pilote ne se veut pas une prévision mais envisage plusieurs scénarios de politique climatique et la façon dont ils pourraient se répercuter sur l’économie canadienne. Le travail de scénario, cependant, souligne les immenses transitions en cours, a déclaré Toni Gravelle, sous-gouverneur de la Banque du Canada.
« Tous les scénarios ont montré qu’au fur et à mesure que nous effectuons une transition globale vers le net zéro, certains secteurs seront considérablement touchés, et l’économie dans son ensemble subira des changements structurels importants. »
S’exprimant lors d’un point de presse, Gravelle a déclaré que l’étude montre que les industries bancaires et d’assurance du Canada doivent planifier soigneusement la transition en cours.
« Pour le secteur financier, une mauvaise évaluation de ces risques climatiques pourrait exposer les institutions financières et les investisseurs à des pertes soudaines et importantes. »
La Banque du Canada et le Bureau du surintendant des institutions financières (BSIF) affirment que cette initiative est une première tentative pour mieux comprendre les risques à long terme posés par la transition vers l’abandon des émissions de gaz à effet de serre, et pour évaluer dans quelle mesure les banques et autres institutions financières modélisent elles-mêmes ce risque.
M. Gravelle a déclaré qu’il est clair que les institutions financières et les autorités financières n’en sont qu’aux premiers stades du renforcement des capacités pour mieux comprendre les risques et les transitions à venir.
Ben Gully, surintendant adjoint au BSIF, a déclaré que même si de nombreuses institutions commencent tout juste à intensifier leurs efforts, il reste du temps, car l’organisme de réglementation vise à établir la résilience d’ici la fin de la décennie.
« Nous avons du temps, mais pas de temps à perdre pour nous préparer à 2030 ».
Le rapport indique que le Canada est plus exposé aux impacts économiques de la transition en raison de son exposition importante aux produits de base dont les prix baisseront à mesure que les politiques climatiques, telles que la tarification du carbone, se renforceront au niveau mondial.
Les scénarios montrent qu’une action plus rapide sur le changement climatique conduira à une transition plus douce et moins risquée, tandis que la modélisation des changements de politique mondiale particulièrement abrupts a montré un désordre potentiel sur les marchés financiers, le PIB du Canada tombant de 10 % en dessous de ce qu’il serait en 2050 par rapport au scénario de base.
L’étude pilote a révélé que les secteurs des combustibles fossiles sont particulièrement exposés au risque, bien que d’autres, notamment les secteurs de la culture et de l’élevage, seraient également touchés, et que le secteur de l’électricité serait stimulé.
L’un des scénarios, qui envisageait l’adoption immédiate des politiques nécessaires pour limiter le réchauffement à deux degrés Celsius, a révélé que les producteurs de pétrole raffiné verraient, d’ici 2050, leur revenu net baisser de 72 % et la possibilité de défaillance augmenter de 450 % par rapport au scénario de référence, tandis que le secteur des cultures pourrait connaître une baisse de 32 % et une augmentation de 141 % de la possibilité de défaillance.
Les scénarios, qui portent sur une période de 30 ans, reposent sur de nombreuses hypothèses et ne tiennent pas compte de plusieurs facteurs clés tels que les risques physiques du changement climatique et la manière dont certaines innovations technologiques pourraient modifier les trajectoires.
Le rapport, qui a été produit en collaboration avec six institutions financières, a constaté que la modélisation peut demander plus d’efforts que prévu et qu’elle est toujours entravée par un accès inégal aux données.
M. Gully a déclaré que, bien qu’il s’agisse d’un effort précoce, le projet pilote est un succès car il sensibilise aux risques et permet de mieux comprendre les implications.
« Les exercices de scénarios climatiques comme celui-ci rendent clairs les impacts potentiels du risque de transition sur une gamme de différentes trajectoires climatiques. »
Ce rapport de la Presse Canadienne a été publié pour la première fois le 14 janvier 2022.