Les interprètes de la Colline du Parlement s’inquiètent de la qualité du service.
Les interprètes parlementaires affirment que la qualité de la traduction et la santé du débat bilingue à la Chambre des communes pourraient souffrir si le Bureau de la traduction du Canada donne suite à son projet de faire appel à des interprètes non accrédités.
L’agence fédérale prévoit de faire appel à des interprètes indépendants, qui ne sont pas accrédités par le Bureau de la traduction, jusqu’à la fin de la session d’automne dans le cadre d’un projet pilote visant à répondre à la demande de traducteurs, dans un contexte de pénurie apparente.
Une nouvelle enquête menée auprès de 92 interprètes qualifiés pour travailler pour le Bureau de la traduction du gouvernement fédéral montre que près des trois quarts d’entre eux n’ont pas été sollicités pour ce travail.
Les interprètes de la Colline sont chargés de traduire en direct les travaux parlementaires, y compris les débats de la Chambre des communes et les réunions des comités, ainsi que de traduire toute la documentation, y compris les projets de loi, les actes, la correspondance et les rapports.
Et l’Association internationale des interprètes de conférence (AIIC) déclare que le projet de la Chambre des communes de recruter des interprètes indépendants non accrédités par le Bureau de la traduction pour répondre aux besoins réduira la qualité du service, mettant ainsi en danger le niveau du débat bilingue.
La Chambre des communes est en train de créer une équipe « B » d’interprètes qui n’ont pas prouvé qu’ils répondaient aux normes de haute qualité exigées jusqu’à présent au Parlement », a déclaré Nicole Gagnon, porte-parole de l’AIIC-Canada, dans un communiqué publié par l’organisation mercredi.
Mme Gagnon a qualifié la décision de l’administration de la Chambre de « malavisée » et a déclaré qu’il y a plusieurs « inefficacités » qui doivent être résolues.
Elle a ajouté qu’aucune institution crédible, y compris les Nations Unies et le Parlement européen, ne ferait appel à des interprètes indépendants qui n’ont pas passé d’examen, comme le permettrait le projet pilote du gouvernement canadien.
L’enquête de l’AIIC montre que malgré le défi apparent du Bureau de la traduction de répondre aux besoins d’interprétation, très peu d’interprètes accrédités se sont vus offrir des missions parlementaires au cours des six derniers mois.
« Il y a beaucoup de pigistes accrédités qui sont prêts, disposés et plus aptes à servir au Parlement « , a déclaré M. Gagnon. « La Chambre des communes met inutilement en péril la qualité du discours bilingue de ses travaux en faisant appel à des fournisseurs qui ne sont pas qualifiés selon les normes du Bureau de la traduction. »
Le Bureau de la traduction n’était pas immédiatement disponible pour commenter.
Entre-temps, la Chambre a voté en juin pour maintenir son modèle hybride – qui permet aux députés de participer aux débats de la Chambre et aux réunions des comités de façon virtuelle, et de voter de n’importe où au Canada – mais les interprètes parlementaires disent que le système leur pose des problèmes.
Plusieurs d’entre eux ont exprimé leurs inquiétudes lors de la pandémie de COVID-19 en disant que la qualité du son lors du travail sur un modèle hybride a eu un impact sur leur travail et a causé des blessures au travail.
L’enquête de l’AIIC montre que plus de deux tiers des personnes interrogées ont jugé les conditions de travail au Parlement virtuel moyennes ou inférieures à la moyenne, notamment en ce qui concerne la qualité du service.
Et si la moitié des interprètes interrogés qui ont travaillé au Parlement dans le passé déclarent qu’il est peu probable qu’ils acceptent un emploi qui ne les amène pas à travailler en personne sur la Colline, les trois quarts d’entre eux se disent préoccupés par la qualité du son sur la Colline. Plus de la moitié des répondants disent avoir réduit le nombre de missions qu’ils acceptent sur la Colline pour cette raison.