Les Canadiens ne savent pas comment leurs données sont collectées : rapport
Un nouveau rapport indique que la technologie numérique s’est répandue à un rythme si rapide que les Canadiens ont peu d’idée des informations recueillies à leur sujet ou de la manière dont elles sont utilisées.
Le rapport de David Lyon, ancien directeur du Surveillance Studies Centre de l’Université Queen’s à Kingston, en Ontario, souligne la nécessité d’une plus grande transparence dans la collecte et l’analyse des données, ainsi que de nouveaux droits numériques et de nouveaux moyens d’assurer la justice pour les Canadiens.
Basé sur des recherches menées entre 2016 et 21, » Beyond Big Data Surveillance : Freedom and Fairness » affirme que les règlements n’ont pas évolué assez rapidement pour suivre les technologies en constante évolution.
En outre, le rapport affirme que certains, comme les femmes, les Noirs et les groupes autochtones, sont plus exposés à la surveillance que d’autres.
L’équipe de recherche s’est penchée sur l’utilisation du Big Data dans les domaines de la sécurité et du maintien de l’ordre, du marketing et de la persuasion politique, ainsi que de la gouvernance par le biais d’innovations telles que les « villes intelligentes. »
Le Centre de surveillance organise une conférence cette semaine à l’Université d’Ottawa pour coïncider avec la publication des résultats.
« Imaginer que les problèmes de surveillance résident principalement dans les caméras dans la rue ou dans le bâtiment dans lequel vous entrez, c’est vivre dans le passé. Vous avez la principale technologie de surveillance dans votre poche – votre téléphone », a déclaré M. Lyon, professeur émérite à Queen’s.
Le rapport intervient alors que le gouvernement fédéral étudie les changements potentiels à apporter aux lois sur la protection de la vie privée qui régissent les organismes des sphères publique et privée, dans un contexte d’influence croissante des plateformes de médias sociaux et d’outils tels que les logiciels de reconnaissance faciale.
Un problème persistant identifié par la recherche est l’information déséquilibrée – la notion que les citoyens et les consommateurs ont peu d’idée des données collectées à leur sujet, sans parler des conséquences de leur visibilité. Pendant ce temps, note le rapport, les entreprises et les gouvernements accumulent d’énormes quantités de données sur les Canadiens, qu’ils utilisent souvent de manière non spécifiée.
Le rapport évoque également le dilemme de la « surveillance embrouillée » d’aujourd’hui, plus complexe que par le passé.
L’intelligence artificielle a donné lieu à des appels à plus de transparence sur le fonctionnement des algorithmes, ainsi qu’à des directives éthiques plus larges, indique le rapport. « Mais peu, même parmi les informaticiens, ont élaboré ce que cette transparence pourrait impliquer. »
Pendant ce temps, diverses agences, dont les services de police, font pression pour utiliser davantage d’analyses de données, tandis que la pandémie de COVID-19 a ouvert de nouvelles voies de surveillance des données.
« L’évolution des technologies et des pratiques est beaucoup plus rapide que les réglementations visant à les maîtriser », indique le rapport.
« Peu de gens peuvent suivre la vitesse et l’ampleur des changements dans l’analyse et l’utilisation des données, ce qui signifie moins de protection, en particulier pour les plus vulnérables. »
Parmi les recommandations du rapport :
– Aller au-delà de la protection traditionnelle de la vie privée pour garantir les droits et la justice en matière de données, alors que les informations personnelles sont de plus en plus utilisées à un niveau de masse ;
– accroître la collaboration entre les chercheurs en sciences sociales et informatiques, les régulateurs et la société civile ;
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– élargir la sensibilisation du public à la façon dont les Canadiens sont affectés chaque jour par la surveillance des données.
» Notre monde post-pandémique exige une action réfléchie et décisive pour évaluer et affronter le monde émergent de la surveillance, qui est partout et souvent discriminatoire « , indique le rapport.
« Ces questions méritent d’être à l’avant-plan de l’éducation de tous, qu’il s’agisse de l’utilisation sûre des smartphones ou des systèmes informatiques responsables. Nous avons besoin de modes innovants d’évaluation et de réglementation des développements numériques. Une société plus libre et plus juste est un monde plus habitable sur le plan humain. »
Ce reportage de la Presse canadienne a été publié pour la première fois le 18 mai 2022.