Le projet fédéral de répression des contenus en ligne préjudiciables fait peau neuve
Le gouvernement fédéral travaille avec un groupe d’experts pour retravailler son projet de loi sur les préjudices en ligne, après que les parties prenantes aient identifié de nombreuses failles à corriger dans leur proposition précédente.
Dans le cadre du projet de loi à venir, le gouvernement avait signalé son intention de rendre les « fournisseurs de services de communication en ligne », tels que Facebook, YouTube, Twitter, Instagram et TikTok, plus responsables et plus transparents quant à la manière dont ils traitent cinq types de contenus préjudiciables sur leurs plateformes : discours haineux, exploitation des enfants, partage d’images non consensuelles, incitations à la violence et terrorisme.
Cependant, après la fenêtre de consultation initiale de l’été 2021, les parties prenantes, y compris les organisations de la société civile, les parties prenantes de l’industrie en ligne et les universitaires, ont exprimé des préoccupations de grande envergure sur ce que le ministre canadien du patrimoine de l’époque, Steven Guilbeault, avait présenté.
Le gouvernement a publié jeudi son rapport « Ce que nous avons entendu », basé sur son évaluation et son examen des commentaires issus du processus de consultation. Le rapport conclut que si la majorité des répondants estiment que le gouvernement doit prendre des mesures pour lutter contre les contenus préjudiciables en ligne, compte tenu de la complexité de la question, la législation à venir doit être réfléchie dans son approche afin de se prémunir contre les « conséquences involontaires ».
Ce qui inclut des éléments tels que :
- La mise en place d’une obligation de retrait en 24 heures pour les contenus jugés préjudiciables, et des pouvoirs de blocage des plateformes récidivistes ;
- Obliger les plateformes à fournir des données sur leurs algorithmes et autres systèmes qui recherchent et signalent les contenus potentiellement dangereux ;
- Obligation pour les sites de préserver le contenu et les informations d’identification en vue d’éventuelles actions en justice ;
- Des sanctions sévères pour les entreprises jugées non conformes à plusieurs reprises, y compris des amendes pouvant aller jusqu’à 25 millions de dollars ;
- La création d’une nouvelle « Commission de la sécurité numérique du Canada » qui serait en mesure d’émettre des décisions contraignantes pour que les plateformes retirent les contenus préjudiciables ; et
- L’installation d’un nouveau système permettant aux Canadiens de faire appel des décisions des plateformes en matière de modération du contenu.
Selon le rapport, les personnes qui ont soumis des commentaires ont déclaré que le gouvernement doit « reconsidérer son approche » de plusieurs éléments clés du projet de loi, afin de répondre aux préoccupations en suspens liées à la liberté d’expression, au droit à la vie privée, à l’impact de la proposition sur les groupes marginalisés et à la conformité avec la Charte canadienne des droits et libertés.
Il s’agit notamment de réévaluer les types de services en ligne qui seraient réglementés et le seuil d’inclusion, les obligations des plates-formes en matière de modération, de suppression et de signalement des contenus préjudiciables, ainsi que la force des organes d’indépendance et de surveillance qui les accompagnent.
« Les répondants ont signalé la nécessité de procéder avec prudence. Nombre d’entre eux ont souligné que l’approche adoptée par le Canada pour lutter contre les préjudices en ligne servirait de référence à d’autres gouvernements agissant dans le même espace et contribuerait de manière significative à l’établissement de normes internationales », peut-on lire dans le rapport.
Maintenant, le gouvernement dit qu’avec les lacunes identifiées, il va travailler avec un groupe d’experts pour conseiller le gouvernement sur la façon d’ajuster sa proposition, dans le but de présenter une législation « dans un avenir proche. »
« Ce travail sera effectué de manière transparente et accélérée… le gouvernement du Canada s’engage à bien faire les choses et à le faire le plus rapidement possible », a déclaré Patrimoine canadien dans une déclaration accompagnant le rapport.
» Nous sommes déterminés à faire en sorte que les plateformes en ligne offrent aux Canadiens des expériences sûres et respectueuses pour s’engager et partager des informations entre eux. Il s’agit d’une question très importante et complexe », a déclaré le ministre du Patrimoine canadien, Pablo Rodriguez, dans le communiqué. Il travaille avec le ministre de la Justice David Lametti et le ministre de la Sécurité publique Marco Mendicino sur le projet de loi à venir.
Le fait de prendre plus de temps pour examiner la législation signifie que les libéraux ne respecteront pas leur promesse électorale d’adopter le projet de loi sur les préjudices en ligne dans les 100 premiers jours de leur nouveau mandat,