Lametti : Le fédéral est prêt à s’impliquer dans le projet de loi 21 du Québec et à surveiller le projet de loi 96.
Le ministre fédéral de la Justice, David Lametti, déclare que le gouvernement fédéral est prêt à s’impliquer dans deux projets de loi québécois controversés, y compris la loi linguistique adoptée mardi, surtout si les projets de loi atteignent la Cour suprême.
« Comme nous l’avons dit depuis le début, nous sommes préoccupés par l’utilisation préventive de la clause nonobstant », a déclaré M. Lametti à la presse mercredi matin, un jour après que le projet de loi 96 ait été adopté par l’Assemblée législative du Québec en utilisant cette clause.
Le projet de loi 96, une loi sur la langue qui apporte d’énormes changements dans de nombreux secteurs du Québec, est le deuxième projet de loi du gouvernement actuel du Québec à être adopté en utilisant cette clause, qui est censée protéger la législation de manière préventive contre les contestations constitutionnelles.
L’autre était le projet de loi 21, le projet de loi sur la laïcité du Québec, qui a été adopté en 2019 et interdit à de nombreux travailleurs publics, y compris les enseignants et les policiers, de porter des symboles religieux au travail.
« Nous avons dit dès le départ que nous voulions laisser une place aux Québécois devant les tribunaux, mais une fois devant la Cour suprême du Canada, c’est par défaut un enjeu national. Nous serons là pour livrer nos arguments », a déclaré M. Lametti.
Le projet de loi 21 s’approche de cette étape, ayant déjà atteint la Cour d’appel du Québec.
« Une fois que la Cour d’appel aura statué, nous irons à la Cour suprême pour donner notre avis sur la question « , a déclaré M. Lametti.
En ce qui concerne le projet de loi 96, il est moins clair jusqu’à présent si les autorités fédérales voudront intervenir. Cela dépendra en partie de la façon dont la nouvelle loi sera mise en œuvre, a déclaré M. Lametti.
« Nous allons, comme je l’ai dit, surveiller la mise en œuvre », a-t-il déclaré, parlant en français. « Il y a des possibilités d’appliquer la loi sans affecter la juridiction fédérale ».
En d’autres termes, la loi pourrait être appliquée d’une manière qui ne viole pas les droits protégés par la Constitution, a-t-il suggéré.
Mais il a dit qu’il est déjà préoccupé par certains aspects du projet de loi 96.
« Évidemment, en tant que ministre, j’ai des craintes… cela affectera-t-il l’accès à la justice ? » a-t-il dit. « Selon l’article 133 de la constitution, les gens au Québec ont le droit d’aller en cour en anglais ou en français. »
Il y a beaucoup d’autres choses à surveiller également, a-t-il dit.
» En tant que citoyen, et (…) en tant qu’élu, je suis préoccupé par l’accès aux soins de santé, par la question de l’immigration, par la façon d’imposer certaines obligations aux immigrants « , a-t-il dit, ainsi que par les droits des peuples autochtones.
Le projet de loi 96 étend les règles strictes de la langue française pour les entreprises, exige que les immigrants, six mois après leur arrivée dans la province, communiquent avec le gouvernement en français seulement, et limite les inscriptions dans les collèges anglophones, tout en créant des changements dans le système judiciaire et, selon certains, dans les soins de santé.
LA CLAUSE DÉROGATOIRE EST UN DERNIER RECOURS, DIT LAMETTI
Outre ces domaines de mise en œuvre, M. Lametti a ajouté que « de toute évidence, la question de la clause dérogatoire est également essentielle » au débat sur le projet de loi 96.
Il a critiqué l’utilisation de cette clause en général, disant qu’elle coupe court à un débat crucial et à un dialogue important entre les tribunaux et la législature, et suggérant que le gouvernement de François Legault utilise la clause à mauvais escient.
« Je me souviens des débats qui ont eu lieu à l’époque », a déclaré M. Lametti, en faisant référence à la date à laquelle la clause dérogatoire a été incluse dans le droit canadien.
« Elle était censée être le dernier mot d’un dialogue entre les tribunaux et la législature, et non le premier mot. »
Lametti n’est pas seulement le ministre de la justice mais le procureur général du Canada.
Cette semaine, l’éminent avocat constitutionnel québécois Julius Grey a présenté un plan pour contester le projet de loi 96, disant qu’il est en train de monter le dossier juridique avec un comité d’avocats québécois.
Il a critiqué le gouvernement fédéral comme étant « mou » sur la loi linguistique, disant que son groupe est prêt à porter l’affaire devant les Nations Unies si la clause dérogatoire rend impossible un appel efficace au Canada.
— Avec des fichiers de la Presse Canadienne.