La consommation de cannabis a un impact sur les capacités cognitives au-delà de l’intoxication : étude
Une nouvelle étude a révélé que la consommation de cannabis, tant chez les consommateurs récréatifs que chez les consommateurs chroniques, peut entraîner des troubles cognitifs aigus persistants et graves qui peuvent se prolonger bien au-delà de la période d’intoxication.
L’examen systématique de 10 articles et de plus de 43 000 participants, dirigé par des chercheurs canadiens et publié mercredi dans la revue scientifique Addiction, a révélé que l’intoxication au cannabis peut entraîner des troubles cognitifs légers à modérés dans des domaines tels que la prise de décision, la suppression des réponses inappropriées et le temps global nécessaire pour accomplir une tâche mentale.
L’étude a également révélé que la capacité à se souvenir de ce que l’on lit ou entend, ainsi que l’apprentissage par la lecture et l’écoute, étaient également affectés.
« Ces déficiences aiguës concordent avec les effets résiduels documentés, ce qui suggère que les effets néfastes du cannabis persistent au-delà de la consommation aiguë », ont écrit les auteurs de l’étude.
Selon l’Organisation mondiale de la santé, le cannabis est la troisième substance psychoactive la plus utilisée dans le monde, après l’alcool et la nicotine.
En 2013, on estime que 181,8 millions de personnes âgées de 15 à 64 ans dans le monde ont consommé du cannabis à des fins non médicales, selon l’OMS, les taux les plus élevés de consommation de cannabis étant signalés chez les adolescents et les jeunes adultes.
Selon les chercheurs, les méta-analyses étaient incluses dans la revue si elles examinaient les effets de la consommation de cannabis sur n’importe quel domaine neurocognitif et si elles impliquaient des individus en bonne santé issus de la population générale.
Les auteurs de l’étude notent qu’ils n’ont pas restreint la recherche à une déficience cognitive spécifique ou à un certain groupe d’âge afin « d’obtenir un meilleur aperçu des résultats. »
Le co-auteur de l’étude, Alexandre Dumais, professeur agrégé de psychiatrie clinique à l’Université de Montréal, a déclaré dans un communiqué de presse que les résultats suggèrent que les « effets néfastes du cannabis » commencent pendant sa consommation, mais peuvent se poursuivre après cette période.
« Notre étude nous a permis de mettre en évidence plusieurs domaines de la cognition altérés par la consommation de cannabis, notamment les problèmes de concentration et les difficultés de mémorisation et d’apprentissage, ce qui peut avoir un impact considérable sur la vie quotidienne des utilisateurs », a déclaré M. Dumais dans le communiqué.
M. Dumais a noté que « de nombreux domaines cognitifs » sont affectés par la consommation de cannabis, les plus importants étant les fonctions exécutives, l’apprentissage et la mémoire verbale, et la vitesse de traitement.
Cependant, l’étude note que ces domaines changent en fonction de l’âge des personnes et du moment où elles ont commencé à consommer du cannabis.
« La consommation de cannabis chez les jeunes peut par conséquent entraîner une baisse du niveau d’instruction et, chez les adultes, de mauvaises performances professionnelles et une conduite dangereuse. Ces conséquences peuvent être plus graves chez les consommateurs réguliers et importants », a déclaré M. Dumais.
Avec les récents changements dans la légalisation du cannabis dans le monde, les auteurs de l’étude rapportent que les perceptions du public sur sa sécurité et son acceptabilité changent également.
Pour cette raison, les chercheurs affirment qu’il est important de comprendre les « risques cognitifs » liés à la consommation de cannabis, en particulier pour les jeunes, dont le cerveau « subit d’importants changements de développement. »
Pour aider à atténuer les risques cognitifs de la consommation de cannabis, les chercheurs disent que les professionnels de la santé devraient être informés des risques potentiels et dépister chez leurs patients une « consommation problématique. » Selon les auteurs de l’étude, il pourrait également être utile de mettre en œuvre des programmes de remédiation cognitive chez les consommateurs de cannabis les plus sévères afin d’essayer d’améliorer la cognition.
Comme les jeunes restent « particulièrement sensibles aux effets du cannabis », les auteurs de l’étude affirment que les établissements scolaires devraient également mettre en place des mesures de prévention et d’intervention pour éduquer les élèves sur la consommation de cannabis et les décourager de consommer cette substance de manière chronique.
Malgré les résultats, les auteurs de l’étude affirment que des recherches supplémentaires sont nécessaires pour examiner si les déficits cognitifs démontrés dans les tâches basées sur la performance s’expriment également dans la vie quotidienne, comme l’oubli de réaliser les tâches prévues, les difficultés scolaires ou les erreurs liées au travail et les accidents de voiture.