COP15 : Le Canada se joint à une alliance minière durable
Le Canada et d’autres pays du G7 ont formé une nouvelle alliance pour obliger les sociétés minières à adopter des normes plus durables sur le plan environnemental et plus responsables sur le plan social alors qu’elles développent des chaînes d’approvisionnement en minéraux essentiels.
Le ministre des Ressources naturelles, Jonathan Wilkinson, a annoncé l’accord entre les pays qui tentent de réduire la domination de la Chine dans le domaine des minéraux essentiels, lundi, lors des discussions sur la biodiversité de la COP15 à Montréal.
Les minéraux critiques désignent environ trois douzaines de métaux et de minéraux nécessaires à la plupart des technologies modernes, y compris les ordinateurs portables et les téléphones cellulaires. Mais ils sont également essentiels aux batteries rechargeables utilisées dans les véhicules électriques, ainsi qu’au stockage de l’énergie et à la production d’énergie renouvelable dans les panneaux solaires et les éoliennes.
La Banque mondiale a prédit en 2020 que la demande de minéraux critiques, notamment le lithium, le cuivre, le nickel, le graphite et les terres rares, augmenterait de 500 % d’ici 2050.
Wilkinson a déclaré à plusieurs reprises que la transition vers des émissions nettes nulles et un réseau électrique 100 % propre ne se fera pas sans l’expansion de l’exploitation des minéraux critiques. [L’annonce a été faite trois jours après que Wilkinson ait publié la stratégie canadienne sur les minéraux essentiels, qui vise à accroître la production de minéraux essentiels au Canada d’une manière qui soit durable sur le plan de l’environnement, qui assure l’équité pour les Autochtones et qui améliore la sécurité mondiale.
Le Canada et les États-Unis font partie des démocraties occidentales qui ont clairement indiqué qu’on ne peut pas permettre à la Chine de dominer les minéraux essentiels d’une manière qui lui donne une influence politique semblable à celle de la Russie sur les exportations de pétrole et de gaz vers l’Europe.
La Chine est clairement l’acteur dominant dans le domaine des minéraux critiques, en particulier dans les domaines du raffinage, du traitement et de la fabrication.
Tous les pays du G7 sauf l’Italie ont rejoint l’alliance, ainsi que l’Australie.
La stratégie canadienne n’est axée que sur l’exploitation minière nationale, et M. Wilkinson a reconnu qu’elle n’aborde pas la question de la durabilité des matières premières extraites ailleurs et apportées au Canada pour y être traitées ou utilisées dans la fabrication de piles.
L’alliance est une tentative d’étendre la stratégie canadienne à l’échelle mondiale, bien qu’il ne soit pas clair dans quelle mesure le Canada ou les autres pays seront sévères pour garantir que les minéraux critiques importés respectent les mêmes normes environnementales et sociales que ceux extraits au pays.
Il ne précise pas non plus le rôle que l’alliance jouera pour s’assurer que ses propres entreprises respectent les normes lorsqu’elles opèrent en sol étranger. Les sociétés minières canadiennes ont une bonne réputation en matière de pratiques minières durables au pays, mais à l’étranger, c’est une autre histoire. Plusieurs poursuites ont été engagées contre des entreprises canadiennes pour des dommages environnementaux, des impacts sur la santé et des violations des droits de l’homme dans d’autres pays.
Les membres de l’alliance ne savent pas non plus s’ils limiteront les exportations vers la Chine de matières premières extraites sur leurs territoires. Le Canada a déjà commencé à appliquer une nouvelle politique visant à limiter le rôle des entreprises d’État des pays non démocratiques dans les minéraux essentiels canadiens, obligeant trois entreprises chinoises à vendre leurs participations dans certains petits projets miniers canadiens.
Mais il y en a beaucoup plus, y compris la seule mine de lithium actuellement en production au Canada, qui se trouve au Manitoba.
M. Wilkinson a déclaré à la Presse canadienne dans une entrevue vendredi que le gouvernement libéral est » très sensible » aux préoccupations concernant l’exportation de trop de matières premières vers la Chine pour le raffinage, le traitement et l’utilisation dans la fabrication, et que la question fait l’objet de discussions.
Les pourparlers sur la nature de la COP15 sont un effort de la plupart des pays du monde pour convenir de politiques qui permettront à la fois de stopper et de réparer la destruction que les activités humaines, y compris l’exploitation minière, ont causée aux écosystèmes mondiaux et aux espèces sauvages. Certains défenseurs de l’environnement ne sont pas satisfaits que le gouvernement canadien annonce, en plein milieu de l’événement, une stratégie d’expansion de l’exploitation minière. [Caroline Brouillette, directrice des politiques nationales au Réseau Action Climat Canada, a déclaré que la stratégie est déconnectée des conversations qui ont lieu à la COP15 et renforce « notre dépendance à l’égard de modèles commerciaux destructeurs qui épuisent les ressources et nuisent aux communautés. »
— Mia Rabson à Ottawa et Jacob Serebrin à Montréal.
Ce reportage de La Presse Canadienne a été publié pour la première fois le 12 décembre 2022.